14 avril 2022 13h53HE
LA PRESSE CANADIENNE/Ron Poling
Le Canada souligne, cette semaine, le 40e anniversaire d’un moment marquant de son histoire politique et de son évolution démocratique.
La Constitution canadienne a été rapatriée le 17 avril 1982 lorsque la Reine Élizabeth II a signé une proclamation, à la colline du Parlement, officialisant l’entrée en vigueur de la Loi constitutionnelle.
Le rapatriement a permis au Canada d’obtenir la pleine souveraineté nationale et la compétence de modifier les lois les plus fondamentales du pays sans l’analyse et l’autorisation préalables du Parlement britannique à Westminster.
L’autre volet de cette nouvelle constitution – une Charte des droits et libertés – offrait un ensemble de droits et de libertés protégés dont la portée dépassait celle des mesures législatives antérieures.
Cependant, cette Charte a vu le jour au terme d’un processus de négociation compliqué, ardu et souvent amer.
Le refus du Québec de ratifier la nouvelle Constitution a donné lieu à d'autres pourparlers au cours de la décennie suivante, mais aucune entente n'a été conclue. De plus, il y a eu de nombreux désaccords quant au contenu de la nouvelle Charte ainsi qu’à l’autorité qui trancherait le débat : soit le Parlement ou les tribunaux.
Voici un aperçu montrant comment nous en sommes arrivés là, ainsi que des moments importants de l’histoire constitutionnelle depuis la Confédération
1867
Le Parlement britannique adopte l'Acte de l'Amérique du Nord britannique créant ainsi le Dominion du Canada.
1919
Le Canada obtient une représentation distincte au sein de la délégation de l'Empire britannique à la Conférence de Paix qui se tient à Paris à l'issue de la Première Guerre mondiale. À l'instar des autres dominions britanniques, le Canada signe le Traité de Versailles et siège, plus tard, à la Société des Nations.
En 1914, les Canadiens étaient automatiquement entrés en guerre sous la bannière de l’Empire britannique.
1926
Une conférence impériale donne lieu au rapport Balfour, qui définit les dominions britanniques comme étant des communautés autonomes.
1931
Le Statut de Westminster confirme l’autonomie du Canada sur le plan législatif. Toutefois, le Parlement du Royaume-Uni détient encore le pouvoir de modifier la constitution du Canada.
Cependant, lors de conférences en 1927 et en 1931, les politiciens canadiens n’arrivaient pas à s’entendre sur une formule d’amendement. Toute modification de l'AANB devait encore faire l’objet d’un vote formel au Parlement britannique.
1960
Le gouvernement de John Diefenbaker adopte une Charte des droits.
1971
La conférence constitutionnelle de Victoria laisse espérer qu’Ottawa parviendra à une entente avec les provinces. Cependant, le premier ministre du Québec, Robert Bourassa, rejette le projet tel que présenté.
1978
Deux conférences de premiers ministres échouent à l’issue de réunions en 1975 et en 1976.
1980
Le référendum sur la souveraineté du Québec, tenu en mai, ne remporte que 40,4 % des voix.
Le 10 juin, le gouvernement fédéral dépose la « Déclaration de principes en faveur d’une nouvelle constitution » à la Chambre des communes. Il présente également les « Priorités pour une nouvelle Constitution Canadienne ».
En octobre, le gouvernement a donc proposé de créer un comité composé de 25 députés et sénateurs qui entendraient les commentaires des Canadiens à l’extérieur de la Chambre des communes.
Ainsi est né le Comité spécial mixte sur la Constitution du Canada, premier comité parlementaire à autoriser la télédiffusion de ses séances.
Peter Van Dusen reçoit Adam Dodek, professeur de droit à l’Université d’Ottawa, pour une discussion concernant l’importance du comité :
1981
La Cour suprême statue qu’Ottawa peut procéder au rapatriement unilatéral de la Constitution tout en reconnaissant qu’il serait illégitime pour Ottawa de le faire sans « l’accord d’un nombre substantiel de provinces ».
Une conférence constitutionnelle a lieu à Ottawa au début du mois de novembre. Le premier ministre Pierre Trudeau, appuyé par l’Ontario et le Nouveau-Brunswick, doit faire face au « Groupe de huit » premiers ministres qui s’opposent au rapatriement sans leur consentement.
Lors de ladite « réunion de cuisine », le procureur général Jean Chrétien négocie avec ses pairs de l'Ontario (Roy McMurtry) et de la Saskatchewan (Roy Romanow) une entente sur la « clause nonobstant » (ou clause dérogatoire) en échange de l’abandon, par les premiers ministres, du droit de retrait des programmes fédéraux pour recevoir un financement équivalent.
Le premier ministre du Québec, René Lévesque, refuse de signer cet accord.
Le 5 novembre, après la conclusion de l’entente, Pierre Trudeau prend la parole à la Chambre des communes. Les chefs suivants réagissent au discours du Premier ministre : Joe Clark (Opposition officielle) et Ed Broadbent (NPD).
Le 20 novembre, Chrétien, Clark et Broadbent participent au débat sur la résolution finale visant le rapatriement :
1982
Le 17 avril, à la Colline du Parlement, Sa Majesté la reine Élizabeth II signe la proclamation qui met en vigueur la Loi constitutionnelle.
La nouvelle constitution comprenait l’AANB ainsi que plusieurs nouveaux éléments, dont une Charte des droits et libertés, une formule d’amendement, le principe de la péréquation, et un contrôle provincial accru sur les ressources naturelles.
1990
L’accord du lac Meech échoue. Les mesures proposées reconnaissaient au Québec le statut de « société distincte » et incluaient un veto constitutionnel pour les provinces.
Plusieurs groupes d’autochtones s’y sont opposés parce qu’on les avait exclus des négociations.
1992
Les électeurs canadiens rejettent l’accord de Charlottetown à la suite d’un référendum national.
1995
Le camp du « Non » remporte de justesse un référendum sur l’accession du Québec à la souveraineté.
2006
La Chambre des communes vote par 265 voix contre 16 en faveur de l’adoption de la motion suivante : Que cette Chambre reconnaisse que les Québécoises et les Québécois forment une nation au sein d’un Canada uni.
Le ministre des Affaires intergouvernementales Michael Chong démissionne pour signifier son opposition à cette motion. Regardez la couverture complète que CPAC a consacrée à ce jour historique.
2021
Les députés votent par 281 voix contre 2 en faveur d'une motion du Bloc Québécois appuyant la loi 96 du Québec, une mesure législative qui modifierait unilatéralement la Constitution et utiliserait la disposition de dérogation pour confirmer 1) le statut du Québec comme nation, et 2) le statut du français comme langue officielle et commune de la province.